Imprimer
Afin que les problématiques de santé publique soient au cœur des préoccupations locales, et de la campagne présidentielle à venir, nous avons décidé de créer à Nantes le collectif CAS, CHU-Actions-Santé.
 
Le collectif CAS a pour but d'informer et de mobiliser localement pour un droit effectif à une santé de qualité et de proximité pour toutes et tous, et pour une modification substantielle du projet de futur CHU de Nantes. 
Rappelons que le maintien de l'hôpital Nord-Laënnec et le léger recul dans la suppression du nombre de lits sont des premières avancées avancées, mais ne seront toujours pas un hôpital répondant aux besoins de la population. La vente récente d'une partie du terrain de l'Hôpital Laënnec à une structure privée à but lucratif, n'augurant rien de bon pour l'avenir de l'offre de soins publics.
Avec tous les autres collectifs engagés partout en France, nous contribuerons à la construction d'un service public de la santé qui garantit l'accès aux soins pour tous et tous. 
 
18 mois de crise sanitaire ont cruellement mis en lumière la fragilité de notre système de soin et révélé à quel point la France n'a plus le meilleur système de santé. Le monde de la santé va mal, et pourtant l'hôpital public est incroyablement absent des débats publics.
Aujourd'hui, les directions des hôpitaux continuent de fermer les lits et les hôpitaux. Si la crise sanitaire a agi comme révélateur, le problème est bien structurel, et la situation actuelle est l'aboutissement de décennies de politiques de réduction des coûts et de privatisation de la santé. En effet, les gouvernements successifs ont organisé la pénurie et les inégalités d'accès aux soins à travers le pays. 
 
À Nantes et en Loire-Atlantique, nous n'échappons pas à cette tendance : en 20 ans la Loire-Atlantique a perdu 1300 lits, soit un quart de sa capacité initiale, dans un contexte de croissance démographique et de vieillissement de la population. Le projet de futur CHU s'inscrit dans la continuité, il correspond au modèle des systèmes de santé à plusieurs vitesses qui fait la part belle au privé et où l'hôpital public est réduit à peau de chagrin, pénalisant surtout les personnes les plus précarisées
 
Dans la région :
853 lits de Médecine Chirurgie Obstétrique ont été supprimés en 5 ans .
- Les temps d'attente aux urgences sont de plus en plus longs, faute de personnels, faute de lieux, faute de lits, faute d'imageries. Certain.es patient.es sont contraintes de rester plus de 40h sur des brancards. L'accès aux soins doit être préservé pour l'ensemble de la population et la médecine de ville n'est absolument pas en capacité de pallier aux défauts de prises en charge des patients nécessitant des soins en urgences.
- Le CHU de Nantes est dans l'incapacité d'activer correctement son capacitaire « hôpital en tension » et paradoxalement ferme des lits au lieu d'en ouvrir.
- La maternité du CHU de Nantes réalise depuis plusieurs années 200 à 300 accouchements par an au-dessus des capacités initialement prévues. Conséquences : de plus en plus de femmes, qui ont eu leur accès refusé au CHU de Nantes, sont renvoyées vers des cliniques privées par manque de place et peuvent être soumises à des dépassements honoraires. Mais certaines de ces cliniques privées sont dans l’incapacité de gérer leur propre patientèle et appelle le CHU aux secours… Malgré cela le futur hôpital IDN (Île de Nantes) ne prévoit toujours pas d’augmentation capacitaire. 
- 82 mineurs en 2020 sont hospitalisés dans des services de psychiatrie adulte au CHU de Nantes faute de places disponibles en pédopsychiatrie sur le département.
- Dans tous les EHPAD du Département, les manques d'effectifs sont criants, avec des conséquences potentiellement graves pour les résident.e.s et des conditions de travail détériorées pour les salarié.e.s. Pire, alors que les besoins sont croissants, l'ARS s'oppose à toute ouverture de nouvel établissement dans le département.
- Le SMUR d’Ancenis a fermé pour une durée indéterminée ; conséquences : des pertes de chance pour les patient.e.s (AVC, infarctus du myocarde, arrêts cardio-respiratoires...) avec le risque de ne pas être pris en charge à temps sur les différents services d’urgences ( de Nantes,  d’Angers ,etc…) déjà totalement saturés.
- Les listes d'attente pour un rendez-vous ou pour une consultation auprès d’un·e spécialiste sont interminables (dermatologue, ophtalmologue, gynécologue ou autre), en ville ou dans un des nombreux déserts médicaux en Loire-Atlantique.
 
Les patient·e·s subissent de plus en plus de maltraitances institutionnelles par manque de personnel et de moyens générant une désorganisation des services. Et malgré tout, on continue de supprimer des postes et des lits.
Les conditions de travail empirent, mettant en danger des soignant·e·s épuisé·e·s, et par extension, les soigné·e·s : le travail et sa pénibilité s’intensifient, les changements d’horaires ou de services imposés aux agents sont incessants, les rappels sur les repos ou congés excessifs. Conséquences : les arrêts maladie et les maladies professionnelles augmentent exponentiellement et les soignant·e·s sont contraints de quitter l’hôpital (par épuisement, par résignation…).
 
 Personne n’a voté pour la destruction du service public de la santé et pourtant elle est belle et bien à l’œuvre depuis 20 ans. Le manque de soins n’est ni une surprise, ni un accident, c’est une politique pensée et menée au mépris des besoins de santé de la population. 
L’organisation de la pénurie de soins est la première étape de la marchandisation des soins qui a été finalisée par la mise en place de la tarification à l’activité (T2A) : chaque acte médical devient une marchandise ou un service marchand. En 2007, Roselyne Bachelot, alors ministre de la santé met en œuvre le « plan hôpital » préparé par Jean Castex lorsqu'il était directeur de l’hospitalisation et de l’organisation des soins (2005-2006). Les hôpitaux publics, gérés comme des entreprises, doivent devenir rentables et empruntent. Ils font donc pression sur leur personnel et favorisent la pratique des actes les plus lucratifs et restreignent au maximum les actes qui coûtent plus qu’ils ne rapportent, comme les urgences, les EHPAD, la psychiatrie. 
 
À Nantes, le projet de futur CHU soutenu par une partie de la majorité métropolitaine et par Johanna Rolland, présidente du directoire du CHU, est une étape de plus du sabotage de la santé publique dans la région. En construisant un hôpital plus petit que l’actuel, avec moins de lits et des budgets sans cesse rabotés, on laisse aux cliniques privées les bénéfices, et aux hôpitaux, toutes les difficultés. Par cet aveuglement, on refuse de voir les réalités démographiques et l’impérieuse nécessité de remettre à niveau nos capacités d’hospitalisations en Médecine, en Chirurgie, en Obstétrique, en Réanimation, en Imagerie médicale, en psychiatrie, etc… Le développement de l’ambulatoire, principe qui guide la construction du futur CHU, repose sur des structures solides de soins de suite à domicile. Or ces structures sont aujourd’hui exsangues faute de financement et de personnel suffisant... Une situation qui conduit trop souvent à des complications médicales et de nombreux décès prématurés à domicile de personnes seules ou âgées.
En réaction, les personnels soignants essaient de nous avertir en multipliant les luttes sociales autour de l'hôpital (sage-femmes, infirmier·es anesthésiste·s, ambulancier·e·s, psychiatrie, personnel médico-social, défense des unités d'hôpitaux, etc..) et doivent être interprétées comme des lanceurs d’alerte pour le pays.
 
Nous appelons à un mouvement qui rassemble toutes ces forces de résistances, ainsi que tous les citoyen.ne.s et leurs élu.e.s, pour construire ensemble un système de santé égalitaire et démocratique. 
 
  Nantes le 8 Décembre 2021